Accueil Monde ANALYSE: Le Liban, un pays qui replonge dans l’instabilité !

ANALYSE: Le Liban, un pays qui replonge dans l’instabilité !

par Naqi Hamza

L’explosion d’hier soir, très impressionnante, survenue au port de Beyrouth par où transitent près de 80% des importations, ayant fait presque 100 morts, a remis en lumière la situation du pays du Cèdre.

En plus d’une crise économique profonde et de la pandémie de COVID-19, les libanais subissent depuis des années une grave instabilité politique, qui mine considérablement le développement du pays.

Entre la fin de la guerre civile en 1990 et le retrait syrien de 2005, le pays a été placé de facto sous un régime de semi-protectorat orchestré par son puissant voisin, la Syrie, qui garantissait un (relatif) équilibre communautaire (il y’a 40% de chiites, 30% de sunnites, 30% de chrétiens, à peu près), mais le régime syrien a aussi laissé transiter et s’implanter des groupes armés comme le Hezbollah.

Ce parti chiite dispose d’une branche armée très puissante, soutenue par l’Iran, qui peut ainsi prendre pied à la frontière de son ennemi juré, Israël.

Cela a déclenché une violente guerre pendant un mois en 2006 durant laquelle le mouvement chiite a repoussé les israéliens et a acquis un certain prestige. Il s’est donc durablement implanté à la fois sur le plan militaire, mais aussi sur le plan politique.

Et face à la poussée iranienne en Syrie, Israël craint de se retrouver encerclé par Téhéran et ses alliés. Un cauchemar pour l’Etat hébreu. Face aux provocations répétées du mouvement armé, Benyamin Netanyahu a menacé a plusieurs reprises d’agir sur le sol libanais. D’autant que le dirigeant israélien est enlisé dans une crise politique profonde qui bloque le pays depuis plus d’un an.

La Syrie et ses ennuis

Même si elle semble écartée pour l’instant, il a vite circulé l’hypothèse d’un attentat terroriste. Pays se prévalant d’une immense tradition d’ouverture, terre de poètes (Khalil Gibran), ou de chanteurs de musiques orientales (Faïrouz) ou islamiques (Maher Zain).

Mais le Liban a subi le contrecoup du terrible conflit qui ravage la Syrie depuis plus de 9 ans. Car les sunnites libanais, même modérés, ont éprouvés un sentiment de sympathie vis-à-vis du sort de leurs cousins syriens. Dans le flux de réfugiés se trouvaient des prédicateurs, des combattants, qui ont instigué au Liban une vision de la religion plus radicale, plus conservatrice, notamment à Tripoli, ou sévissaient des prédicateurs assez radicaux, exilés par Damas.

Une économie chancelante

La troisième thèse, celle d’un accident, d’une explosion d’un entrepôt où était stockées 2.750 tonnes de nitrate d’ammonium depuis 6 ans sans mesure de sécurité, semble aussi une possibilité réelle. Elle illustre la décrépitude des infrastructures industrielles du pays.

Il faut dire que des années d’instabilités politiques et sociales ont laissé l’économie en ruine alors que le Liban était longtemps considéré, avec Beyrouth comme place financière, comme une sorte de « Suisse du Proche-Orient« .

Mais les divers conflits ont fait fuir les investisseurs – et les touristes qui auparavant se pressaient sur la plages du pays, notamment les français, puisque les libanais sont (et restent) francophones et francophiles, héritage du mandat français entre les deux guerres mondiales. Illustration aussi par les liens personnels de nombreuses personnalités, Léa Salamé (française mais née à Beyrouth et fille d’un politique local), Carlos Ghosn, le chanteur Louis Chedid ou le boxeur Ali Hallab.

Mais les touristes et les investisseurs sont partis. Et les infrastructures en ont sévèrement pâti. D’autant que, contrairement à ses voisins arabes le pays n’a pas de pétrole et peu de ressources naturelles, vivant quasi exclusivement de l’aide de ses alliés (Iran, Syrie, mais aussi France), et des envois d’argent de l’importante diaspora libanaise. Une diaspora qui a encore fait montre d’une solidarité dont le pays aura bien besoin après cette catastrophe.

Par Amaury Dubois

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